La norme Z39.50 : un outil essentiel pour l'uniformisation de la recherche d'information

par

Martin Sévigny


Cursus vol.1 no 1 (octobre 1995)


Cursus est le périodique électronique étudiant de l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information (EBSI) de l'Université de Montréal. Ce nouveau périodique diffuse des textes produits dans le cadre des cours de l'EBSI.

ISSN 1201-7302

cursus@ere.umontreal.ca
URL:http://www.fas.umontreal.ca/ebsi/cursus/

L'auteur

Diplômé de l'EBSI en 1995, Martin Sévigny est assistant de recherche à l'EBSI et consultant en technologies de l'information. Il s'intéresse plus particulièrement aux documents structurés, à SGML, au repérage de l'information et à l'hypermedia. Dans le cadre de sa maîtrise, il a conçu un prototype de logiciel d'interrogation pour une base de documents structurés.

La norme Z39.50 : un outil essentiel pour l'uniformisation de la recherche d'informations a été écrit à l'automne 1994 dans le cadre du cours Structures et fonctions des logiciels documentaires (BLT 6351) donné par le professeur Yves Marcoux.

Pour joindre l'auteur: sevignm@ere.umontreal.ca


Droits d'auteur

Tout texte demeure la propriété de son auteur. La reproduction de ce texte est permise pour une utilisation individuelle. Tout usage commercial nécessite une permission écrite de l'auteur.



INTRODUCTION

L'arrivée de l'informatique est encore toute récente dans l'histoire des technologies, mais déjà on peut parler d'une révolution qui a affecté son évolution. Au début des années 1980, la micro-informatique a permis à un plus grand nombre de gens d'utiliser des ordinateurs, alors qu'aujourd'hui, les réseaux, le partage et les normes tendent à mettre un peu d'ordre dans le fouillis informatique.

La recherche automatisée d'informations bibliographiques est apparue dès les premiers pas de l'informatique, mais a longtemps évolué sans modèle commun, au gré de la volonté des différents producteurs de systèmes. Cependant, au milieu des années 1980, des gens intéressés ont mis en commun leurs ressources dans le but de définir une norme en matière de recherche d'information. Cette norme, appelée Z39.50 et définie par l'organisme américain NISO (National Information Standards Organization), fait l'objet du présent document.

L'objectif de ce document n'est pas de décrire en détail les particularités de la norme Z39.50. L'accent sera plutôt mis sur sa mise en contexte: d'où elle émerge, où elle s'en va, quelles sont ses applications. C'est pourquoi ce document comporte des parties importantes sur le modèle OSI et sur des produits commerciaux utilisant la norme Z39.50.

Ce texte vise aussi à faire réaliser aux spécialistes de l'information l'importance de la normalisation, des réseaux, et de la norme Z39.50 en particulier. La dernière partie proposera une réflexion sur ce thème.

1. L'INTERCONNEXION DES SYSTÈMES OUVERTS

1.1 Introduction

Posséder un ordinateur et l'utiliser de toutes les façons peut satisfaire bon nombre de besoins personnels. Cependant, la mise en réseau d'un certain nombre d'ordinateurs a un effet multiplicateur sur la performance générale. Même si au départ seuls des ordinateurs semblables pouvaient communiquer, de nos jours les réseaux sont omniprésents et relient des ordinateurs très différents, accomplissant des tâches très variées.

Un effort de normalisation est nécessaire pour relier des ordinateurs et les faire communiquer convenablement. La norme Z39.50 s'inscrit dans ce gigantesque effort. Son fondement théorique est issu de l'International Organization for Standardization (ISO) qui, en 1978, a créé un sous-comité chargé de spécifier un cadre de référence dans le but de développer des normes pour la communication entre ordinateurs. Les travaux de ce groupe ont produit le "Open Systems Interconnection Reference Model" (ISO 7498), ou encore "Modèle de référence de l'interconnexion des systèmes ouverts", ou plus simplement "Modèle OSI". Les prochains paragraphes discutent de ce modèle et sont basés sur l'ouvrage de Denenberg (1989).

Selon ce modèle, l'expression "interconnexion des systèmes ouverts" qualifie les "normes pour l'échange d'information entre des systèmes qui sont ouverts aux autres, parce qu'ils utilisent certaines normes appropriées" (Denenberg 1989, traduction libre).

1.2 Les niveaux de protocole

Pour les utilisateurs de l'Internet, la communication entre ordinateurs éloignés apparaît simple et fiable. Un message par courrier électronique se rend rapidement au destinataire et l'intégrité du message est habituellement respectée. Cependant, une série d'opérations sont nécessaires afin d'accomplir cette tâche relativement simple.

Tout d'abord, le contenu du message n'est pas seul à circuler; il est accompagné par un autre type d'information: l'information de contrôle. Les messages, qui contiennent les données et l'information de contrôle, sont échangés selon un certain protocole, c'est à dire, un ensemble de formats et de procédures permettant l'échange d'information. La notion de protocole est omniprésente dans les questions relatives aux réseaux informatiques.

Pour faciliter la description et la compréhension des différents protocoles, on a créé le concept de niveaux de protocoles. En effet, les communications peuvent être divisées en plusieurs tâches, qui sont elles-mêmes hiérarchiques, d'où la notion de niveau. Par exemple, pour transmettre un message, on peut choisir de transmettre des bits en les regroupant en paquets. Ainsi, la transmission de données repose sur la transmission de paquets qui repose à son tour sur la transmission de bits. Dans cet exemple simple, on observe trois niveaux de protocoles: un pour les message, un autre pour les paquets et enfin un dernier pour les bits.

Le modèle OSI a formalisé le concept de niveaux de protocoles et les appelle des couches (layers). Le principe est le suivant: on divise les fonctions de communication en couches, et on développe des protocoles différents pour chaque couche; le modèle prévoit sept couches du genre. Chaque couche peut être représentée par deux programmes, résidant sur deux ordinateurs différents, et communiquant avec un protocole défini pour cette couche.

Les différentes couches sont divisées en deux grandes catégories: les couches d'information (les trois couches supérieures), et les couches de données (les quatre couches inférieures). Ces dernières traitent les données de façon brute, c'est-à-dire sans égard à leur signification pour les applications. Ainsi, elles se chargeront simplement de faire circuler les bits et les paquets de bits. Les couches d'information interviennent au moment où les données deviennent de l'information, c'est-à-dire lorsqu'elles prennent une signification particulière pour une application (où même pour un être humain).

Voici un bref aperçu de ces sept couches:

Septième couche: APPLICATION application layer

Responsable du soutien aux applications. Habituellement, les différentes applications utilisent différents protocoles.

Sixième couche: PRÉSENTATION presentation layer

S'assure que le contenu de l'information soit respecté pendant la transmission. Dans ce sens, on dit que cette couche est responsable de la syntaxe des informations transmises.

Cinquième couche: SESSION session layer

Permet l'échange organisé et synchronisé entre les applications. Les applications se définissent des règles de dialogue et la couche de session est responsable du respect de ces règles.

Quatrième couche: TRANSPORT transport layer

Permet la transmission des données de façon efficace et sûre.

Troisième couche: RÉSEAU network layer

Responsable du routage des informations dans les réseaux, de la segmentation des messages par l'expéditeur et du réassemblage par le récepteur.

Deuxième couche: LIENS DE DONNÉES data link

Permet la délimitation des unités appelées paquets (frames).

Première couche: PHYSIQUE physical layer

Responsable de la transmission des bits. Cette couche gère notamment les aspects mécaniques et électriques de la transmission.

1.3 Le modèle OSI et la réalité

Le modèle de l'interconnexion des systèmes ouverts est excellent en théorie, et certaines applications en sont issues. Notons que la norme X.25 du ICCTT (International Consultative Committee for Telephony and Telegraphy) est une application du modèle OSI au niveau des trois couches inférieures. D'ailleurs, plusieurs applications de transmission de paquets reposent sur cette norme, et donc sur le modèle OSI. Par contre, on retrouve peu d'applications pour les couches supérieures du modèle.

2. LA NORME Z39.50

2.1 Historique

Les débuts de la normalisation des fonctions de recherche d'information remontent à 1984 (McCallum 1990, 61). À ce moment, une proposition de normalisation bibliothéconomique du "New York Item" fut présentée à l'ISO, et certains autres projets étaient menés au Canada, en Norvège et ailleurs aux États-Unis.

Parallèlement, des américains travaillaient dans le contexte du modèle OSI pour développer des applications de recherche d'information et de transfert de données. Ces recherches préliminaires furent transmises au NISO qui détacha un sous-comité pour ce projet. En 1988, le premier produit issu de ce sous-comité vit le jour, et ce fut la première version de la norme Z39.50. Une application connue de cette norme est le protocole WAIS, pour Wide Area Information Server, fréquemment utilisé sur l'Internet (Howell 1992, 69).

Pendant ce temps, la proposition du New York Item fut acceptée par l'ISO, qui en fixa le calendrier de développement. En 1991, deux protocoles naquirent de ces travaux, soit les normes ISO 10162/10163, communément appelées "Search and Retrieval Protocols". De son côté, Z39.50 a continué d'évoluer, et une seconde version était acceptée en 1992, appelée "Z39.50 - 1992". Concrètement, ISO 10162/10163 est un sous-ensemble de Z39.50 - 1992.

Par la suite, les travaux du comité se sont poursuivis, notamment sous l'impulsion des compagnies qui ont produit des applications Z39.50 (voir plus loin) et une troisième version de la norme fut soumise au vote en décembre 1994 et acceptée dans les mois qui suivent. On y fait référence avec l'appellation "Z39.50 - 1995" <URL:http://ds.internic.net/z3950/z3950.html>

L'organisme chargé de la "gestion" de la norme Z39.50 fut mis sur pied par la Library of Congress des États-Unis et s'appelle "Z39.50 Maintenance Agency" <URL:http://lcweb.loc.gov/z3950/agency/agency.html> On peut trouver le texte complet de la norme, version 1995, à cette adresse:

<URL:ftp://ftp.loc.gov/pub/z3950/official>

et celui de la version 1992 à l'adresse suivante:

<URL:http://www.cni.org/pub/NISO/docs/Z39.50-1992/www/Z39.50.toc.html>.

Cet article est toutefois basé sur la version 1992 de la norme puisqu'au moment de l'écrire, les applications de la version 1995 ne sont pas nombreuses et la documentation est rare.

2.2 Z39.50 et le modèle OSI

Z39.50 est une norme s'appliquant au niveau de la couche d'application du modèle OSI. Par conséquent, les couches inférieures doivent être présentes, en particulier la couche de présentation. Cependant, la plupart des institutions qui ont décidé d'implanter la norme Z39.50 l'ont fait en la superposant directement au-dessus de TCP/IP (qui peut jouer un rôle semblable aux quatres couches inférieures du modèle OSI) plutôt que de l'intégrer totalement dans le modèle OSI (Lynch 1994).

Les producteurs ont choisi cette option pour plusieurs raisons. Tout d'abord, plusieurs s'inquiétaient de la maturité des installations OSI, ainsi que de leur stabilité. De plus, les ressources n'étaient tout simplement pas disponibles à certains endroits, alors que l'expertise avec TCP/IP est beaucoup plus répandue. Soulignons également que la compatibilité avec TCP/IP rend l'utilisation sur l'Internet presque immédiate, ce qui favorise la diffusion de l'information à court terme. Rien n'empêche de revoir cette décision plus tard.

Il est nécessaire d'insister sur le fait que même si Z39.50 est implantée par-dessus TCP/IP, sa conception demeure dans l'esprit du modèle OSI. Le jour où il y aura des applications matures des protocoles OSI (de bas niveau), il sera possible de bâtir des applications Z39.50 qui utiliseront ces protocoles.

Techniquement, le "Internet Assigned Number Authority" a assigné le port 210 aux connexions Z39.50 via TCP/IP. Par conséquent, pour établir une connexion d'un client à un serveur Z39.50, le client doit ouvrir une connexion TCP avec l'ordinateur du serveur, en utilisant le port 210, puis envoyer une chaîne d'initialisation et d'identification du type de service. Le reste du fonctionnement est typique des applications client-serveur en environnement TCP/IP.

2.3 Le protocole Z39.50 : vue d'ensemble

La norme Z39.50 permet d'aller au-delà des fonctions de bases de données traditionnelles. En effet, un client Z39.50 ne se préoccupe pas de la structure interne des bases de données du serveur qu'il rejoint, comme il devrait le faire avec un serveur SQL par exemple. Lynch (1991) parle d'ailleurs de "bases d'information" plutôt que de bases de données, lorsqu'il décrit les particularités du protocole Z39.50. Dans cette section, je m'inspire de son excellent texte pour donner un aperçu des fonctions de la norme Z39.50 (version 1992).

On peut distinguer deux grandes parties dans Z39.50. Il y a tout d'abord le mécanisme général qui permet au client d'interroger le serveur de différentes façons, et à celui-ci de répondre aux requêtes des clients. Les informations de contrôle nécessaires à ce genre d'opération sont incluses dans la norme. De façon générale, le client envoie une requête avec la commande search, et le serveur répond avec la commande present. Les mécanismes de contrôle sont assurés par les requêtes de type resource control.

Les concepteurs de la norme ont voulu cette première partie très générale, afin d'éviter au client la nécessité de connaître les particularités du moteur de recherche propre au serveur. Cependant, certaines restrictions s'imposent. Tout d'abord, le serveur ne doit répondre que par un seul ensemble de réponses, et celui-ci doit être un sous-ensemble de la base d'informations. Ainsi, les moteurs qui retournent l'ensemble de la base d'information mais avec des indices de pertinence pour chaque élément ne sont pas directement compatibles avec Z39.50. De plus, la norme ne prévoit aucun mécanisme pour le transfert d'information sur les critères de pertinence utilisés par les moteurs de recherche.

Cette première partie, telle que définie, permet à la norme Z39.50 d'être assez générale pour relier plusieurs types de bases d'information. Elle n'est pas uniquement reliée aux applications bibliothéconomiques, mais de façon générale à la tâche de recherche d'information. Cet élément n'est pas toujours bien compris, et il semble que Z39.50 soit quasi inconnue à l'extérieur du monde bibliothéconomique (Lynch 1990).

La deuxième grande partie de la norme Z39.50 définit un langage de recherche spécifique, de type booléen. Ce langage est constitué d'une série d'attributs et de valeurs qui sont reliés par les opérateurs and, or et andnot. Nous n'irons pas plus loin dans la description des particularités de ce langage qui pourrait faire l'objet d'un article en lui-même.

3. QUELQUES APPLICATIONS DE LA NORME Z39.50

3.1 Généralités

Plusieurs compagnies impliquées dans le repérage d'information ont commencé à développer des serveurs et des clients Z39.50. Mentionnons Data Research Associates, Geac, Research Libraries Group (RLG), VTLS, etc. Soulignons également l'effort de la Bibliothèque Nationale du Canada qui, le 9 novembre 1993, a fait connaître ses logiciels supportant la norme <URL:http://ds.internic.net/z3950/nlc.txt>. Par conséquent, le code est disponible pour ceux qui voudraient construire une application sans tout redéfinir (disponible sur <URL:ftp://ftp.nlc-bnc.ca/public/irtool/>). Au Québec, les deux grands producteurs de systèmes intégrés de gestion de bibliothèque (Best-Seller et DRA Information) développent présentement des applications Z39.50 pour leur logiciel.

Dans les pages qui suivent, l'objectif n'est pas de dresser une liste exhaustive des applications supportant la norme Z39.50, mais bien de montrer quelques exemples.

3.2 Le partage des ressources catalographiques

Le catalogage fut une des premières fonctions des bibliothèques à être automatisée. Des serveurs catalographiques existent depuis fort longtemps et sont toujours très utilisés. Récemment, deux serveurs importants, CATSS (Cataloguing Support System) de ISM et RLIN (Research Libraries Information Network) de RLG ont mis au point des systèmes basés sur la norme Z39.50.

RLG a développé à la fois un client et un serveur Z39.50 (Stovel et al. 1993). Tous les deux sont conçus de façon à exploiter TCP/IP. Par conséquent, un système utilisant un client Z39.50 peut interroger la base de données catalographique RLIN via l'Internet. ISM et son catalogue CATSS y ont vu un intérêt certain pour leurs clients. RLIN contient plusieurs notices qui ne se retrouvent pas dans CATSS. ISM a donc développé, à l'intérieur même de son système CATSS, un client Z39.50. Celui-ci est configuré de manière à pouvoir interroger la base RLIN, via un lien TCP/IP et la norme Z39.50.

Pour l'utilisateur de CATSS, cela représente un grand avantage. Lorsqu'il effectue une recherche dans cette base de données, il a la possibilité de répéter, à l'aide d'une seule commande toute simple, la même requête dans RLIN. Ses chances de trouver une notice appropriée augmentent donc considérablement. L'usager n'a pas à se soucier des différences de syntaxe entre CATSS et RLIN; la norme Z39.50 établit un pont entre les deux systèmes.

Pour ISM et CATSS, il s'agit d'un service supplémentaire pour leurs clients, particulièrement les bibliothèques universitaires. Quant à RLG, ils offriront un service semblable une fois que ISM aura terminé l'implantation d'un module serveur Z39.50 sur son système CATSS. Les deux bases de données étant sensiblement de même grandeur et complémentaires, ce lien réciproque profite à tous, et particulièrement aux usagers qui peuvent interroger deux systèmes de façon quasi transparente.

Les projets d'avenir ne manquent pas pour améliorer ce service. Du côté d'ISM on espère conclure une entente semblable avec OCLC, le géant du catalogage. Cependant, étant donnée la taille de CATSS, OCLC est moins pressé à aller de l'avant. Par ailleurs, ISM espère éventuellement offrir ses services selon un mode totalement client-serveur, et la norme Z39.50 pourrait jouer un rôle important à ce sujet.

3.3 La station de recherche d'information

Dans un article qui pouvait sembler à l'époque un peu futuriste, Phillips (1992) prévoyait que les chercheurs utiliseraient éventuellement une station de recherche personnalisée, qu'il appelait le "Scholar's workstation". L'idée était de rendre disponible toute l'information nécessaire aux chercheurs pour l'exercice de leurs fonctions, et cela à partir de leur micro-ordinateur et d'une interface unique. Bien entendu, il prévoyait que la norme Z39.50 jouerait un rôle important pour le développement de cette station de travail.

De nos jours, on retrouve des stations de recherche qui ressemblent à cette description, sous la forme de clients Z39.50 qui utilisent l'Internet pour interroger des bases lointaines. On retrouve notamment Geopac (Farley et al. 1994), de la firme GEAC, qui peut tourner sur un PC sous Windows. Il permet d'interroger tous les catalogues qui ont un serveur Z39.50 actif. L'interface est toujours la même, peu importe la base interrogée, ce qui permet au chercheur d'apprendre un seul langage d'interrogation. Geopac vise un très grand marché. Les abonnés de l'Internet qui ont une communication de type SLIP peuvent utiliser Geopac à partir de la maison, par modem. Si le nombre de bases de données accessibles par Z39.50 croît comme on peut l'espérer, l'information accessible au moyen d'interface pourrait devenir impressionnante.

De plus, l'interface de Geopac est destinée à un très large public qui ne possède pas nécessairement une grande expérience de la recherche dans les bases de données. L'interface très visuelle et la manipulation directe d'objets permettent aux non initiés de s'habituer rapidement au logiciel.

Par ailleurs, Geopac ne se limite pas à l'information textuelle. Il permet de visualiser des images codées dans un grand nombre de formats, du son et du vidéo. Il s'agit réellement d'une application multimédia, limitée présentement seulement par le faible nombre de bases de données multimédias accessibles via Z39.50.

Soulignons également le logiciel Willow, développé par les services informatiques et les bibliothèques de la Washington University

<URL:http://www.cac.washington.edu/willow/home.html>. Ce logiciel, conçu pour le système de fenêtrage Motif sous UNIX, permet d'interroger plusieurs bases de données, a l'aide de "pilotes de bases de données". Un de ces pilotes existe justement pour Z39.50.

De son côté, VTLS a aussi conçu une station de recherche d'information, baptisée VTLS InfoStation <URL:http://www.vtls.com/>. Ce logiciel permet d'interroger en mode hypermédia un catalogue basé sur le système VTLS. Il permet donc de visualiser des images, du son ou du vidéo. De plus, on y a intégré un module client Z39.50, ce qui le rend apte à réaliser les mêmes fonctions que Geopac. Notons également que la firme américaine Data Research Associates produit le logiciel DRA Find, semblable à GeoPac. Ces produits ont sûrement beaucoup d'avenir.

3.4 Z39.50 et le World-Wide Web

La norme Z39.50 vise à rendre l'information disséminée dans plusieurs bases de données accessible à l'aide d'une même interface. Les clients du World-Wide Web (WWW ou Web) poursuivent un peu le même objectif pour les ressources de l'Internet. Le mariage de ces deux outils est inévitable pour plusieurs.

Deux approches sont présentement utilisées pour relier les deux protocoles. On peut utiliser un serveur du WWW avec une passerelle Z39.50, ou encore un client du WWW avec le support de Z39.50 via les URL (voir les informations complètes à l'adresse <URL:http://www.vtls.com/market/z39/cniz3950.html>.

La première option suppose que le serveur WWW intègre également un client Z39.50. Il utilise ce client pour reformuler les requêtes provenant d'un client du Web vers un serveur Z39.50. Au retour, il reformate les informations provenant du serveur Z39.50 en HTML (HyperText Markup Language) et les retourne ainsi au client qui a fait la requête. À l'Université du Nouveau-Brunswick, l'accès à une base de données (ABI/Inform sur plusieurs CD-ROM) est disponible via le WWW, grâce à ce mécanisme (Cunningham et Sloan, 1994). Les programmes requis pour ce genre d'opérations sont rendus disponibles par le Clearinghouse for Networked Information, Discovery and Retrieval (CNIDR, <URL:ftp://ftp.cnidr.org/>).

Dans le deuxième scénario, c'est le client du Web qui fait tout le travail. Mais pour y arriver, il faut ajouter un nouvel élément, ou nouveau service, au système des URL (Uniform Resource Locators). La proposition serait d'utiliser "z3950://...". Le système mis sur pied par VTLS utilise cette option.

3.5 Les futures applications de Z39.50

Nous avons vu dans les sections précédentes trois applications assez différentes de la norme Z39.50: échange de données catalographiques, station de recherche d'information, intégration à un réseau mondial. Il s'agit des premiers pas, mais ils sont très significatifs pour établir ce que sera l'avenir.

Il semble que le concept de station de recherche d'information possède un avenir intéressant. Avec de plus en plus de gens qui possèdent une connectivité directe sur l'Internet (avec adresse IP), il y aura un intérêt pour ce genre d'application. À l'aide des (faibles) possibilités multitâches des systèmes de fenêtrage pour ordinateur personnel, un chercheur pourra laisser rouler son application de recherche en toile de fond, et faire des sauts rapides pour chercher l'information pertinente, et ce à travers une multitude de bases de données.

Ces visions futuristes sont intéressantes, mais leur réalisation repose sur un aspect important: le nombre et la disponibilité de bases de données utilisant le protocole Z39.50. En janvier 1995, on dénombrait près de 120 bases disponibles <URL:http://ds.internic.net/z3950/dblist.txt>, et plusieurs de celles-ci sont accessibles via l'Internet. De plus, il faudrait que des bases de données autres que des catalogues en-ligne d'accès public (OPAC) soient disponibles en grand nombre, particulièrement des bases multimédia. Les outils pour interroger de telles bases sont déjà très intéressants, mais leur succès (et celui de la norme) repose sur la disponibilité de l'information.

4. Z39.50 ET LES SPÉCIALISTES DE L'INFORMATION

Les spécialistes de l'information doivent se soucier du développement de la norme Z39.50. Cette norme pourrait constituer un pas majeur vers la bibliothèque virtuelle, dans la mesure où elle permet l'interrogation d'une multitude de sources d'information à partir d'un même logiciel d'interrogation. L'impact sur le travail de bibliothécaire de référence dans une institution universitaire, pour ne citer que cet exemple, est très important. En effet, plusieurs heures hebdomadaires sont consacrées à la formation des utilisateurs, pour que ces derniers tirent profit des outils sophistiqués que possède la bibliothèque : catalogue automatisé, CD-ROM, etc. Présentement, il faut enseigner plusieurs outils de recherche, presque autant que le nombre de bases de données. Pouvoir réduire le nombre de logiciels de recherche à un seul par milieu permettrait aux bibliothécaires de se consacrer à d'autres tâches plus reliées à la fonction recherche et diffusion d'informations.

Les spécialistes de l'information doivent donc être au courant des développements de la norme ou du moins savoir qu'il existe des outils permettant l'interrogation de plusieurs bases de données. Au moment de choisir un logiciel documentaire, la capacité des logiciels évalués de se conformer à la norme Z39.50 peut devenir un critère très important.

D'un autre côté, les bibliothécaires ont développé une grande expertise de la recherche d'information dans des bases de données très variées. Cette expertise doit être mise à contribution dans le développement des normes pour la recherche, comme Z39.50. Un désintéressement à cet égard peut compromettre l'évolution de la norme.

CONCLUSION

L'année 1995 a vu la naissance de la troisième version de la norme Z39.50 qui en est à sa septième année d'existence. Il ne s'agit donc pas d'une norme immuable: elle évolue régulièrement. Les concepteurs ont préféré définir un standard imparfait et bâtir à partir ce celui-ci, plutôt que chercher la perfection du premier coup.

Cette caractéristique (qui contraste avec la philosophie du modèle OSI) a peut-être aidé la cause de la normalisation des fonctions de recherche d'information, car des produits ont pu être développés rapidement. Par contre, ce manque de stabilité a pu éloigner certains producteurs qui veulent l'assurance que leur produit restera compétitif longtemps.

Aujourd'hui, les six années de la norme et sa compatibilité avec les versions antérieures devraient inciter tous les concepteurs à se lancer dans l'aventure Z39.50. Cela concerne autant le monde bibliothéconomique que les producteurs de bases de données en général. Pour les spécialistes de l'information, la norme Z39.50 doit devenir une nouvelle entrée à leur cahier des charges, un nouvel aspect à intégrer à leur veille technologique. Désormais, ces six caractères magiques devraient faire partie de toute grille d'évaluation de bases de données ou de logiciels d'interrogation.


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RESSOURCES DE L'INTERNET SUR Z39.50

Texte de la norme (version 1995)

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Agence de gestion

<URL:http://lcweb.loc.gov/z3950/agency/agency.html>

Index de ressources sur Z39.50

<URL:http://is.rice.edu/~riddle/webZ39.50.html>

<URL:http://ds.internic.net/z3950/z3950.html>

Information sur Willow

<URL:http://www.cac.washington.edu/willow/home.html>

Information sur VTLS

<URL:http://www.vtls.com/>

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Interface WWW-Z39.50

<URL:http://www.vtls.com/market/z39/cniz3950.html>

Clearinghouse for Networked Information, Discovery and Retrieval (CNIDR)

<URL:http://cnidr.org/welcome.html>

<URL:http://cnidr.org/zserver.html>